Simplifier, c'est possible!

Publié le

-

2019

Les citoyens et les entreprises sont quotidiennement confrontés à de lourdes formalités administratives et à la complexité de la réglementation, ce qui engendre souvent plaintes et lamentations mais cela ne va généralement pas plus loin. Toutefois, dans sa recommandation du 20 mai 2020 relative au programme national de réforme 2020 de la Belgique, le Conseil de l'Union européenne indique que les charges administratives pour les entreprises s’élèvent chaque année à environ 7 milliards d’euros. Outre la législation fiscale, la législation du travail est pointée du doigt. Plus qu’une simple « nuisance », il s’agit d’un véritable problème économique.

Cette complexité, ainsi que ces charges administratives, ne sont naturellement pas nouvelles. Et, tandis que l’attention se porte généralement sur les entreprises et les citoyens qui y sont confrontés, l’impact pour les fonctionnaires n’est pas non plus à sous-estimer. En effet, il incombe aux fonctionnaires d’appliquer la législation et de répondre aux questions des employeurs et des travailleurs. Plus la législation est complexe, plus il y a de problèmes, ce qui augmente considérablement la charge de travail.

Rôle de l’administration

En tant qu’administration, le SPF Emploi rédige lui-même de nombreux textes législatifs, généralement à la demande spécifique du Ministre ou du Gouvernement. Bien que la mission ou l’objectif soit fixe, l’administration peut quand même avoir une influence non négligeable sur la façon dont la mesure sera mise en œuvre. On sous-estime parfois l’importance de cet aspect. La différence entre une législation qui permet de traiter 95% des cas sans problème au lieu de 90% des cas signifie en effet la moitié moins de travail.

Cependant, même si l’administration s’applique, lors de la rédaction de chaque nouvelle loi ou arrêté, pour que la mesure reste la plus simple possible, l’exercice n’est pas toujours évident. De plus, chaque modification de la législation semble encore ajouter une complexité supplémentaire. Combien de fois arrive-t-il que la cellule stratégique demande à l’administration de supprimer quelque chose?

Faire des propositions ?

Eh bien oui ! L’administration n’est pas obligée d’accepter des règles complexes comme un mal nécessaire et inévitable. Rien n’empêche le SPF de soumettre lui-même des propositions au Ministre dans le but de contribuer à la simplification de la législation. Avec une bonne dose de créativité, un soupçon d’initiative et un zeste de confiance et de persévérance, l’administration peut imaginer des propositions débouchant sur une législation plus claire et plus simple et donc plus facile à appliquer.

Le Maribel social réformé

La Division de l’Emploi de la Direction générale Relations individuelles du travail, organes de participation et emploi (qui faisait alors encore partie de la DG Emploi et Marché du travail) a ainsi pris l’initiative de réformer en profondeur le Maribel social. Depuis l’instauration du tax-shift, l’application du Maribel social était devenue extrêmement compliquée et certains aspects de la réglementation étaient devenus difficilement contrôlables.

Le projet d’arrêté royal rédigé par l’administration simplifiait dans une large mesure la législation, notamment en uniformisant les règles en matière d’application du plafond salarial et de financement, en rassemblant plusieurs obligations de contrôle administratif et en supprimant les règles inutilisées et superflues.

Il est long et mouvementé, le parcours de l’arrêté royal, depuis le premier projet jusqu’à sa version finale signée et publiée dans le Moniteur belge. En effet, il y a de nombreux acteurs à convaincre : avant tout, le Ministre et sa cellule stratégique, mais également l’ensemble du Gouvernement et les partenaires sociaux.

L’initiative de cette simplification a été fortement appréciée par la cellule stratégique du ministre de l’Emploi et les partenaires sociaux l’ont également trouvée très positive. Dans son avis du 27 février 2018, le Conseil national du Travail indiquait explicitement qu’il ne pouvait que se réjouir de cette amorce de simplification, ajoutant que cette simplification de la réglementation Maribel rendait celle-ci plus compréhensible et permettait à tous les acteurs de l’appliquer plus facilement.

Voir finalement l’arrêté royal du 19 septembre 2019 publié dans le Moniteur belge constitue dès lors une grande satisfaction. Certes, cette opération de simplification a naturellement demandé des efforts mais, lorsque ces efforts finissent par payer, cela s’accompagne d’une réduction permanente de la charge de travail à la fois pour les acteurs mais également pour l’administration concernée.

Plus de responsabilités, moins de contrôle

La Division de l’Emploi a également pris une initiative concernant les projets supplémentaires en faveur des groupes à risques. L’expérience a appris au SPF Emploi que ces dispositions, instaurées fin 2013, ont donné lieu à une forme très intensive de contrôle de l’utilisation des deniers publics dans le cadre de projets et d’actions en faveur des jeunes. Cela impliquait une charge administrative très lourde non seulement pour les fonds et institutions de formation, mais également pour l’administration. En outre, ces contrôles intensifs et contraignants présentaient l’inconvénient de restreindre les possibilités, pour les acteurs, d’investir les moyens de façon flexible et créative dans des projets novateurs.

À nouveau, la cellule stratégique du ministre de l’Emploi de l’époque a soutenu entièrement cette initiative. Davantage d’autonomie, de participation et de flexibilité ont été accordées aux (sous-)commissions paritaires qui, ce faisant, ont également reçu davantage de responsabilités quant à l’utilisation utile et efficiente des moyens disponibles. De ce fait, la mission de contrôle de l’administration a pu s’en trouver restreinte dans une importante mesure, même s’il va de soi qu’en tant qu’autorité, nous devons continuer à veiller à ce que les subventions soient allouées à des projets en faveur des jeunes durant la période d’exécution donnée. Dans le cas contraire, l’administration pourra toujours refuser le remboursement des frais engagés. L’arrêté royal du 5 février 2019 permettra ainsi de réduire considérablement la charge de travail de l’administration.

Tenir bon

Toutefois, il va sans dire que les initiatives de l’administration n’aboutissent pas toujours à une nouvelle simplification de la législation. Ainsi, malgré des tentatives répétées de simplification, l’obligation en matière de premier emploi a conservé sa forme actuelle. Cette réglementation est complexe et n’est pas adaptée à l’évolution des autres législations. De plus, les lourdes formalités administratives à remplir pour les entreprises qui veulent obtenir une dispense de l'obligation premier emploi sont peu efficaces car, de manière générale, l'obligation peut être facilement respectée. Si malgré tout, l’entreprise ne respecte pas cette obligation, il y aura peu de conséquences étant donné que l’employeur n’est sanctionné que très exceptionnellement. Une dernière tentative visant à adapter le mécanisme de sanction a échoué le 28 juin 2017 au Conseil national du Travail avec un avis mitigé des partenaires sociaux car les différentes banques ne partageaient pas la même vision quant à l’utilité et l’avenir de cette mesure. Toutefois, la partie n’est pas encore perdue : dès que l’opportunité se présentera, la Division remettra cette problématique sur la table et, tôt ou tard, elle obtiendra la simplification tant attendue de cette obligation.